Dans l'Humanité du 3 mars 2009 : un article de Sébastien Homer

 

(http://www.humanite.fr/2009-03-03_Societe_Prisons-Un-enseignant-en-quete-d-evasion)

 

Prisons. Un enseignant en quête d’évasion

Patrick Leterrier nous raconte son expérience de professeur en maison d’arrêt. Témoignage.

« Au cas où vous voudriez me contacter prochainement, sachez que je serai absent pour deux semaines. Je pars manifester en Guadeloupe ! » À la lecture de ces quelques lignes, nous ne fûmes guère surpris de voir - sans ironie aucune - que Patrick Leterrier était en quête d’évasion : pendant près de dix ans, il a été enseignant à la maison d’arrêt de Cherbourg. Si, depuis deux ans, il officie au sein d’une classe-relais, il raconte son expérience en milieu carcéral dans Et là vivent des hommes, un ouvrage modeste mais passionnant, à cent lieues du sensationnalisme. Un livre d’autant plus précieux que, si les soignants et les psys sont nombreux à écrire sur le monde carcéral, les enseignants sont rares à relater leur expérience. C’est d’ailleurs ce qui a motivé Patrick Leterrier à prendre la plume, lui qui voulait aussi faire un sort à tous les poncifs sur la prison.

« J’ai coutume de dire que c’est par hasard que je me suis retrouvé à enseigner en prison. Après dix ans de travail au sein d’un GRETA, j’ai su qu’un poste d’enseignant se libérait à la maison d’arrêt de Cherbourg. Et comme les candidats ne sont pas légion et que j’avais les compétences, je l’ai eu. Mais, en fait, c’est tout sauf un hasard, nous explique-t-il. C’est comme de travailler aujourd’hui auprès de jeunes collégiens déscolarisés avec lesquels un contrat de trois mois est passé et qui me rappellent, pour certains, ceux que j’ai connus derrière les barreaux. Ce qui m’intéresse, de fait, ce sont les personnes en difficulté. Et pour un enseignant, cela veut dire l’élève qui nous met en difficulté. »

Sauf qu’après presque dix ans ce ne sont pas des élèves dont s’est lassé ce professeur des écoles de quarante-huit ans, mais du cadre. « Les deux dernières années, je souffrais d’un véritable sentiment… d’enfermement », avoue-t-il dans un sourire. En quatrième de couverture comme tout au long de son livre, Patrick Leterrier ne cesse d’interroger ce milieu carcéral où l’on compte 20 % d’illettrés : « Comme tout intervenant extérieur, un enseignant en prison est là pour apporter un plus aux détenus. En clair, du savoir. Ou, aout du moins, le mettre en situation d’apprentissage. Mais, en réalité, cette dimension-là est reléguée au second plan. Lorsqu’ils s’inscrivent pour suivre mes cours, les détenus cherchent avant tout à rencontrer quelqu’un, à discuter, à créer du lien. À s’échapper de leur cellule. »

Lui dénonce « une faillite du système » que symbolise parfaitement l’explosion des suicides en prison. « Le taux de suicides est sept fois plus important en prison que dans la société et, au mitard, il est encore sept fois plus élevé que dans le reste de la prison. De fait, la prison, c’est une institution en échec. Car, si elle a pour mission de mettre des individus en dehors de la société pour la protéger, elle a aussi pour mission à la fois de protéger ces individus. Et d’aider à leur réinsertion. Or le nombre de suicides derrière les barreaux prouve que la prison n’arrive même pas à assurer leur propre sécurité. Quant à les réinsérer, on ne s’en donne même pas les moyens. » Et de conclure : « On ne doit pas être sur la bonne voie en enfermant. » Raison de plus pour s’évader.

 

Sébastien Homer

 

 

 

 

Sur Nonfiction.fr, le portail des livres et des idées, voici ce qu'en dit Camille Putois :  

 

(http://www.nonfiction.fr/article-388-nonfiction.htm)

 

 

Problèmes de société

 

Résumé :Pessimisme et espoir se croisent dans ce témoignage d'un enseignant en milieu carcéral, qui pointe du doigt les insuffisances de la prison.

 

"Et là vivent des hommes est un texte sombre. Le lecteur retiendra certes les lumineux moments de bonheur d’un enseignant qui réussit à ouvrir les détenus d’une maison  d’arrêt à la lecture, au calcul, à l’écriture ou tout simplement à l’autre. Mais il constatera surtout le pessimisme profond d’un intervenant pour qui "la prison est bien le pire endroit que l’on puisse imaginer pour envisager une quelconque réinsertion.

Patrick Leterrier, professeur des écoles tout frais émoulu de l’IUFM, a choisi d’enseigner à la maison d’arrêt de Cherbourg. Une seule classe pour tous les niveaux, de l’illettré (20% des détenus) au diplômé du supérieur (plus rare). Son "public" est constitué surtout des jeunes destructurés qui n’ont connu de l’école que les difficultés et la rébellion.

Seuls les détenus volontaires viennent en salle de classe. Quelques uns sont motivés par le désir d’apprendre, tel ce manouche qui souhaite enfin savoir lire et écrire. Mais la plupart ont une motivation plus basique : sortir de la cellule, s’extraire de l’enfermement, rencontrer un intervenant extérieur, échanger, parler, discuter.

Car Et là vivent des hommes est tout autant le récit d’un pédagogue et d’un formateur qu’un témoignage édifiant sur la condition carcérale dans la maison d’arrêt de Cherbourg. Évoquer ces élèves, leurs appréhensions, leurs réactions, leurs préoccupations, c’est évoquer les conditions de vie dégradantes qui sont les leurs et qui rendent vaines tout projet pédagogique un peu construit et durable.

Comment se lever tôt pour aller en classe quand on n’a pas pu dormir de la nuit parce que la télévision est restée allumée ? La vie en prison est à l’inverse de la vie en société : on préfère vivre la nuit et se lever tard, les jours se suivent et se ressemblent dans l’oisiveté et la déresponsabilisation.

Souvent alcooliques et/ou toxicomanes lorsqu’ils sont incarcérés, les détenus ont les plus grandes difficultés à se concentrer. L’enseignant tente au moins de renouer avec un désir d’apprendre et de s’ouvrir sur l’autre. Mais il est seul et doit gérer des situations qui relèveraient davantage de la psychiatrie. Pas de projet professionnel, les ambitions pédagogiques sont réduites au minimum, sans que l’administration, qui incite peu les détenus à aller en classe, constate l’auteur, s’en préoccupe vraiment.

La conclusion est logiquement sévère : "j’ai acquis la conviction que ces conditions de détention sont indignes du respect que l’on doit à tout être humain, qu’elles sont génératrices de conflits, de haine, de violence et vont à l’encontre de ce qu’il conviendrait de faire, à savoir tenter de rendre des individus plus sociables."

 

 

Un article dans "Cherbourg-Octeville Magazine" de juin 2009 :

http://www.ville-cherbourg.fr/fr/tourisme_decouverte/publications_et_documenta/cherbourg-octeville_magaz/fichiers/mag_129.pdf

 

Témoignage d’un instit en prison

 

Dans son livre Et là vivent des hommes, Patrick Leterrier témoigne de ses neuf années passées à enseigner à la Maison d’arrêt de Cherbourg-Octeville. Avec peu – ou pas – de moyens et des élèves disparates, souvent détruits, Patrick Leterrier raconte les liens qu’il a su créer, au fil des jours, ses combats d’une journée et ses victoires. Il retrace aussi l’existence, au jour le jour, de ses occupants. «Intervenir à la Maison d’arrêt, quelle qu’en soit la raison, c’est être témoin, qu’on le veuille ou non.» Et ce témoignage, Patrick Leterrier a décidé de le partager dans un livre simple, sans effet de style, à lire absolument. Et là vivent des hommes de Patrick Leterrier, éditions de L’Harmattan.

 

- un article dans le bulletin municipal de Tourlaville, "Reflet" N° 121 de mai 2007:

www.mairie-tourlaville.fr/fr/vie_locale/culture/lire/fichiers/p_leterrier.pdf

 

- un article sur le site maville.com :

www.cherbourg.maville.com/actualite/2008/05/22/cherbourg/p-leterrier-et-a-servant-dialoguent-sur-la-prison-aujourd-hui-61640735.html

 

- un article dans "Territoire d'expression" n°2 :

www.territoiredexpression.com/?p=228

 

 

- un article dans la Manche libre
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Un article dans la Presse de la Manche
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